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L’hilarante hypocrisie de Jonathan Franzen

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David Gaughran est un auteur irlandais basé à Londres. Il a publié jusqu’ici deux nouvelles, un roman  et deux guides très bien faits sur l’autopublication: Passons au numérique et Let’s get visibleIl signe aussi régulièrement, sur son blog, des articles pénétrants et acidulés sur le monde de l’édition en général, et sur la guégerre qui oppose les tenants de l’édition traditionnelle et de l’autoédition. Récemment, il a commenté une contribution de l’écrivain américain Jonathan Franzen dans le Guardian, intitulée Ce qui cloche dans le monde moderne. « Un acte monumental d’autoparodie », dit-il. Je précise que j’ai lu les deux premiers romans de Franzen, Les Corrections et Freedom, deux livres  magnifiques, et que je tiens cet auteur pour un grand écrivain. Traduction (partielle) de cet article.

Dans son article du Guardian, Jonathan Franzen part en guerre contre les ebooks, l’autopublication et la lecture digitale. Pour résumer Gaughran, sa posture est celle d’un mandarin des lettres, bien installé dans le monde de l’édition traditionnelle, gâté par les critiques, mais qui tremble un peu face à un univers éditorial qui change à grande vitesse. Pour lui, les ebooks ne sont pas de vrais livres, les auteurs autopubliés ne comptent pas, et on peut supposer qu’il estime qu’aucun auteur autopublié n’écrit de littérature sérieuse. « Bien qu’il affirme croire en l’égalité », commente Gaughran, « c’est vraiment un élitiste de la pire espèce. »

 

Une des nombreuses choses que Franzen déplore au sujet des changements de paradigme en cours dans le monde de l’édition est la disparition en cours des « critiques littéraires responsables ». « Bien sûr », note David Gaughran, « responsable » signifie ici un critique traditionnel parlant d’un livre publié de manière traditionnelle et qui limite son intérêt aux écrivains mâles de fiction littéraire sérieuse, produite par un petit cercle d’éditeurs approuvés. (…) Franzen est également préoccupé par la santé des librairies et les menaces qui pèsent sur les  « Big Six », les grands éditeurs new yorkais.

« Ce qui est en train de remplacer tout cela cause beaucoup de douleur à Franzen. Un système qui permet à chacun de publier. Des détaillants qui offrent tous les livres, ceux de l’édition traditionnelle comme ceux issus de l’autopublication. Et un monde dans lequel les lecteurs peuvent donner leur avis sur les livres qu’ils aiment. En d’autres termes, la démocratisation de toute une chaîne. Ceci, pour Franzen, c’est l’apocalypse. »

Répondant à un passage nostalgique de Franzen dans son article du Guardian au sujet des années 50, période supposée être l’âge d’or de l’édition et de la critique, quand « de vénérables éditeurs investissaient sur le long terme dans de jeunes auteurs », David Gaughran rappelle qu’un écrivain du nom de Lawrence Block avait vendu sa première nouvelle en 1957 pour 100 $ – environ  830 $ d’aujourd’hui. Et il poursuit : « J’ai vendu ma première nouvelle en 2009, pour le même montant. 100 $ (de 2009). Et j’en étais heureux. Si Franzen a raison sur un sujet quelconque, c’est que toute une série de changements intervenus depuis les années 50 se sont faits au détriment des auteurs : la popularité en chute libre des magazines publiant des nouvelles, la réduction des articles consacrés aux livres dans les journaux, et les continuelles fusions-aquisitions entre maisons d’édition, jusqu’à ce qu’on en arrive (aux Etats-Unis en tout cas) à la situation actuelle : cinq entreprises mastodontes qui luttent pour essayer de voir au-delà des chiffres de leur dernier trimestre. »

Pour Gaughran, ce que Franzen diagnostique comme une poursuite de ces tendances (en raison de l’accès généralisé à Internet, de la transition vers les achats en ligne, de la montée en puissance des ebooks) est en fait la solution qui répond aux problèmes qu’il déplore. « Le réflex néo-luddite de Franzen signifie qu’il voit ‘’Internet accélérer la paupérisation des écrivains ‘’ quand, de mon côté, je vois plus d’écrivains que jamais gagner leur vie en vendant des livres grâce à Internet. »

Le diable, pour Franzen, c’est bien sûr Amazon : « Jeff Bezos d’Amazon n’est peut-être pas l’antéchrist, mais il apparaît sûrement comme un des quatre cavaliers de l’Apocalypse. Amazon veut un monde dans lequel les livres sont soit autopubliés soit publiés par Amazon lui-même, avec des lecteurs qui dépendent des commentaires postés par d’autres lecteurs sur Amazon pour choisir leurs livres, et avec des auteurs qui doivent prendre en charge leur propre promotion. »

 « C’est dans des moments comme ceux-là », écrit David Gaughran, « quand Franzen porte son regard sur une cible particulière, que sa larmoyante hypocrisie devient la plus visible. Quelle que puisse être votre opinion sur Bezos et Amazon, n’est-ce pas pour le moins hypocrite de les railler quand vous êtes publié par Harper Collins,  propriété de Rupert Murdoch ? »

« Harper Collins publie un certain nombre d’excellents auteurs, mais il publie aussi One Direction (un groupe musical anglo-irlandais qui s’est illustré dans une émission de téléralité et qui « écrit »), David Beckham et Justin Bieber. Harper Collins a aussi quelques collaborateurs de valeur, mais il emploie également des cadres qui avaient pensé que ce serait une bonne idée d’agir en collusion avec d’autres éditeurs pour fixer le prix des ebooks, et d’acquérir  une maison d’édition à compte d’auteur. »

« Franzen », poursuit Gaughran, « a peur d’un avenir où les lecteurs décideraient exclusivement de leurs achats de livres en se basant, dit-il, sur des commentaires facilement gagnés sur Amazon, mais il n’a aucun problème avec la longue pratique des éditeurs qui paient pour placer leurs livres sur les premières gondoles des librairies, sur les listes de best sellers, ainsi que dans les clubs de lectures parrainés par des célébrités. »

 

 

 

 

 

 

 

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